Cher(e)s camarades, cher(e)s ami(e)s,
En l’espace de quelques semaines tout un monde a changé : du Maroc au Yémen, de la Tunisie à Oman, de la Jordanie à l’Irak et à Bahreïn, de l’Algérie à la Syrie et au Liban, et l’Égypte redevient « Oum el dounya », la Mère du monde.
C’est toujours vrai : si les conditions sont bonnes « une étincelle peut mettre le feu à la plaine » et du coup, celle-ci n’est plus ce qu’elle était ; elle a complètement changé, et tout le monde ou presque est pris au dépourvu… Qui aurait pu imaginer, il y a seulement quelques mois, que Moubarak et sa clique seraient amenés en prison ou devant un juge en Égypte ! Et oui, camarades, Moubarak et ses deux fils et la plupart de sa clique sont déjà en prison ou en résidence surveillée en Égypte. Cette Égypte qui, en un rien de temps, s’est débarrassée de sa peur et de sa torpeur. Hier encore, le rapport des Nations unies « sur le développement humain en Égypte » disait à propos de la « culture de peur » que moins de 3% seulement des Égyptiens sont disposés à signer une pétition de protestation ou à participer à une manifestation…, moins de 3% seulement !
Et la voilà aujourd’hui, « Oum el dounya », avec ses millions d’hommes et de femmes dans la rue incarnant et amplifiant à l’infini l’indignation et la révolte de l’Immolé de Sidi Bouzid ; et de la place Tahrir à toutes les villes du monde arabe la révolte se propage et la détermination s’affirme ; et du coup, la peur change de camp. Rien ne sera plus comme avant ; ni les baltagia [voyous du pouvoir] et autres nervis des régimes en place depuis une éternité, ni les milliers des moukhabarat [police secrète] ou autres services de répression ne pourront endiguer le torrent révolutionnaire des masses populaires.
Camarades, de derrière ces abominables murs où je me trouve depuis un certain temps, je ne peux qu’être admiratif et quelque peu émerveillé devant l’ampleur de ce mouvement et l’émergence devant nos yeux de ce monde arabe nouveau. Bien entendu, à partir d’une prison, il est toujours assez difficile de saisir la complexité d’un processus révolutionnaire en cours, à plus forte raison si l’on se trouve à l’aube d’une nouvelle époque. La crise mondiale du capitalisme qui a éclaté en 2008 constitue le cadre global de toute cette nouvelle époque. Et tout naturellement le changement en cours dans le monde arabe s’inscrit d’emblée comme facteur déterminant dans le cours de cette crise. Abordées sous cet angle, les tâches des révolutionnaires et plus particulièrement des communistes, des deux bords de la Méditerranée, devraient inciter les uns et les autres à mettre l’intérêt international du prolétariat au premier plan de leurs activités. Tout au long de ces parcours de lutte où les soulèvements de masses dans les différents pays arabes constituent seulement des moments distincts dans le cheminement du processus révolutionnaire aussi bien national qu’international, les discussions, les débats ainsi que l’élaboration des diverses perspectives communes seront appelés à être intensifiés en vue d’une meilleure disposition des forces anticapitalistes anti-impérialistes.
Plus que jamais, camarades, affirmons le combat commun au quotidien et faisons en sorte que chaque pas en avant pour les uns le soit aussi pour les autres.
Camarades, nous ne sommes qu’au début d’une longue phase de transition entre un monde arabe déjà mort et un autre tout juste naissant… Nous voyons à l’œil nu l’interpénétration des traits pourris de cette époque révolue et pas encore complètement enterrée et les traits à peine dessinés de ce nouveau monde en devenir… Certainement la transition, comme toujours, est fonction des aléas des rapports de forces réellement existants entre les composantes sociales des divers pays arabes dans le cadre global de la crise mondiale du capitalisme. Tout naturellement, face au mouvement révolutionnaire des masses populaires, la dictature des régimes capitalistes en place peut tomber plus rapidement dans un pays que dans un autre…, seulement ce qui est inéluctable pour l’avènement dunouveau monde arabe c’est la chute de tout ce système capitaliste qui n’est plus qu’un ensemble de facteurs en crise explosive.
Camarades, ensemble nous vaincrons, et certainement ce n’est qu’ensemble que nous vaincrons !
À bas les dictateurs et leurs régimes capitalistes !
À bas les impérialistes et leurs chiens de garde !
Non à toutes les interventions militaires impérialistes sous n’importe quelle forme !
Honneurs aux martyrs et aux masses populaires en lutte !
Ensemble, camarades, nous vaincrons !
Mes salutations les plus chaleureuses à vous tous, camarades !
Votre camarade Georges Abdallah