Lettre ouverte : demande de libération de Georges Ibrahim Abdallah
Bruxelles, le 15 novembre 2018
Madame Dunja Mijatović, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe,
Georges Ibrahim Abdallah, cofondateur de la Fraction armée révolutionnaire libanaise, est un militant révolutionnaire qui, dès 1979, s’était engagé dans la défense de la cause palestinienne. Il est arrêté en 1984 et condamné en 1986 à quatre ans de prison pour détention d’arme et usage de faux papiers. De nouveau jugé en 1987, malgré ses dénégations, pour complicité d’assassinat, il est condamné à la perpétuité.
Incarcéré sous le numéro d’écrou 2388/ A221, il vient d’entamer ce 24 octobre 2018, sa 35e année de détention.
Il ne s’agit pas pour nous de discuter ou justifier ici des actes pour lesquels Georges Ibrahim Abdallah a été condamné : nous demandons justice pour l’homme.
Libérable depuis dix-neuf ans, il a à ce jour plus que doublé la peine de sûreté de quinze ans assortie à sa condamnation.
Chaque heure de plus passée en prison prend désormais la forme d’une vengeance et d’un acharnement qui met à mal les droits fondamentaux de la personne humaine. Cette situation doit cesser.
Nous ne sommes pas les seuls à nous exprimer en ces termes. Des soutiens de parlementaires, de personnalités diverses, de collectifs citoyens locaux exigent sa libération. Il y a quelques jours, une manifestation avait lieu devant la prison de Lannemezan (Hautes Pyrénées, France) pour rappeler l’urgence de sa relaxe.
Pour l’heure, le gouvernement français argumente de la séparation des pouvoirs et l’indépendance de l’autorité judiciaire pour ne rien faire. Nous sommes les premiers à défendre cette indépendance de la justice par rapport au pouvoir politique. Cependant, dans le cas précis d’Abdallah, la chambre d’application des peines a justement statué favorablement sur la demande de libération, subordonnant cette décision à un arrêté d’expulsion signé par le Ministre de l’Intérieur, donc soumise au pouvoir exécutif.
Cependant sous pression des États-Unis, la demande de libération e été déclarée irrecevable. Il s’agit donc d’un sujet éminemment politique, nous en avons conscience, et ce dans un contexte international sous tension.
Cependant cette situation ne peut reléguer au second plan la question des droits de l’Homme qui restent inaliénables.
Georges Ibrahim Abdallah a maintenant 67 ans. Il a passé plus d’une moitié de vie incarcéré, ce qui lui confère le statut de plus ancien prisonnier politique sur le continent européen. Le Liban se dit prêt à l’accueillir.
Dans le cadre de votre dialogue avec les autorités nationales sur la mise en œuvre systématique des droits de l’Homme, nous vous prions donc de bien vouloir interpeller le gouvernement français sur ce cas.
Dans l’attente de votre réponse,
Marie-Pierre Vieu (députée européenne, France)
Barbara Spinelli (députée européenne, Italie)
Marie-Christine Vergiat (députée européenne, France)
José Bové (député européen, France)
Lidia Senra Rodriguez (députée européenne, Espagne)
Javier Couso Permuy (député européen, Espagne)
Nikolaos Chountis (député européen, Grèce)
Dimitrios Papadimoulis (député européen, Grèce)
Patrick Le Hyaric (député européen, France)
Tania Gonzalez Penas (députée européenne, Espagne)
★ Pétition-lettre ouverte à l’initiative du PRCF 33 (Pôle de Renaissance Communiste en France), qu’il sera possible bientôt de signer en ligne :
(…) Ne serait-on pas en droit de demander avec exigence à ce même Parquet, comme à la Justice française : où sont les assassins de Mahmoud Alhamchari (ancien représentant de l’OLP à Paris), de Mahmoud Saleh (fondateur de la Librairie Arabe à Paris), de Zuheir Mohsen (secrétaire général de ALSAIIQA), de Ibrahim Abd El Aziz, de Ezzdin Alkalak… ? La Justice française serait-elle partisane ? De quoi veut-on se venger contre M. Georges Ibrahim Abdallah ? (…)
★ Lettre ouverte de Pierre Dharéville, député communiste des Bouches du Rhône à la Garde des Sceaux :
(…) La peine de prison effectuée par Georges Ibrahim Abdallah équivaut à plus du double d’une peine de sûreté de 15 ans. Il n’y a pas trente-six interprétations possibles : son maintien en détention obéit à des motifs politiques, au mépris de nos principes fondamentaux. Pouvez-vous affirmer que les autorités israéliennes et étasuniennes ne sont pas intervenues en ce sens auprès des gouvernements français successifs, transformant la justice française en instrument de vengeance, contraire à l’esprit du droit dans notre pays. (…)